Appelez-moi Madame ! Chapitre 4

29 septembre 2013 - 4 heures du mat'. Je suis assise sur une chaise à observer les quelques invités qui se démènent encore sur la piste. Mon père improvise un solo de air guitar sur "La Grange" des ZZ Top (non, il n'est pas saoul - il n'a simplement pas fermé l’œil depuis 2 jours... paye les dégâts). Je réalise tout doucement que voilà, ce mariage (mon mariage !) que j'ai préparé pendant plus d'1 an touche à sa fin. J'ai les pieds en compote, je ne supporte plus ma robe qui commence sérieusement à me peser et je revois en boucle dans ma tête le déroulement de cette journée de dingue : les préparatifs stressants (fichu maquillage !) et l'émotion des cérémonies (soulagée à l'idée que je n'ai finalement pas fait de ventre-et-glisse enroulée comme un nem dans ma robe en remontant la nef de l'église).

Il faut dire que le sentiment "je me retrouve toute con" (tu noteras que je ressens un peu la même chose après avoir déballé tous mes cadeaux de Noël - seule au monde entourée des papiers cadeaux en boulettes), je l'ai vite ressenti une fois le cocktail terminé. Y a pas à dire, le jour de son mariage, on vit un drôle de truc dans sa tête. Genre les montagnes russes de l'émotion : un coup on est hyper heureuse, un coup on a juste envie de s'isoler pour souffler un coup loin de l'attention de tout le monde. Réaliser vraiment les choses qui nous arrivent n'est pas une mince affaire et c'est vraiment une fois le cul sur ma chaise, à 4 heures du mat', que j'ai réalisé.

Avant cela, il y a donc eu le cocktail puis le repas. J'avais plus que hâte que mes invités découvrent ma décoration de mariage et surtout celle de ma salle de réception après le cocktail se déroulant à l'extérieur. Parce que comme tu le sais, j'ai travaillé comme une forcenée (aidée par mes petits lutins) pour que le tout soit comme je l'imaginais dans mes rêves, inspirée par les jolies idées que j'ai glanées au fil de mes lectures sur les blogs mariage. Je voulais quelque-chose de romantique (je ne suis pas fan des mariages médiévaux par exemple, même si Monsieur BG me promettait Jon Snow en guest star entre l'assiette de fromages et la pièce montée) mais pas totalement cucul la praline non plus. Je voulais des fleurs, des fleeeuuuuuurs, des fleeeeeeeuuuuuuuuurs par milliers (hum... par dizaines finalement, vu le budget que ça demande). Le tout dans des tons poudrés, rosés et verts.

Nous (mes petits lutins et moi) avons essayé au maximum de tout faire de nos propres mains. Les petits cœurs accrochés à chaque chaise, la customisation de nos bocaux à bonbons, mes fameuses boules hortensia Martha Stewart, mon plan de table avec bâtonnets de glace aux prénoms de mes invités plantés dans des pots de fleurs numérotés, mes menus, mes petites bougies, mes numéros de table, mes marque-places, mon arbre à vœux, mes bidules machins trucs... (oui la liste est longue). Bref, j'aurais pu ouvrir un atelier loisirs créatifs à la maison avec tout le matos que j'ai acheté au fil des mois (et qui me reste aujourd'hui sur les bras).

J'avoue, j'ai été plus que fière d'offrir à mes invités une salle comme celle-ci car je ne pensais pas que le tout rendrait aussi bien (j'avais même peur que les choses ne collent pas les unes avec les autres). Alors quand est venu le moment pour tout le monde de rentrer dans la salle à 20 heures, j'étais comme survoltée (bon, l'idée de m'asseoir pour de bon durant le repas n'y était pas pour rien non plus). C'est donc sur "Get Lucky" de Daft Punk (quelle originalité !) que Monsieur BG et moi avons fait notre entrée. Morceau choisi à l'arrache car nous n'avions aucune idée de ce que nous allions bien pouvoir faire pour ce moment - "4 Mariages pour 1 Lune de Miel" nous ayant traumatisés à vie. Monsieur BG et moi ne sommes clairement pas des danseurs nés et encore moins des gros metteurs d'ambiance. L'idée de mettre "I gotta Feeling" m'était aussi insoutenable que celle de faire la chenille ou une démonstration de flamenco (marche aussi avec la salsa, la valse, le jerk... toutes les danses de la Terre). Bref, on était mal barrés !

Finalement et à mon grand étonnement, Monsieur BG a pris le micro pour faire son petit discours. Il a dérapé sur plein de mots, la conjugaison et la concordance des temps laissaient parfois à désirer à cause de l'émotion ("Doudoune, si je ne t'aurais pas rencontrée, on aura pas vécu cette magnifique journée" - c'est un exemple, j'exagère... un peu...), mais j'étais bien infichue de l'aider, me mettant à nouveau à chouiner de honte hi hi !. Et puis patatras ! Je ne sais pas ce qui a pris Monsieur BG (et son 2nd degré) à cet instant mais va savoir pourquoi, à la fin de son speach, il a eu la bonne idée d'entonner quelques paroles de "Destinée" de Guy Marchant dans le micro (peut-être se croyait-il à La Nouvelle Star ?) et mon dieu... il a déclenché le plus bel orage de cette fin d'été 2013 ! Nous avons eu de la chance toute la journée niveau météo. Mais le soir, pendant que nous étions tous à table, c'était le déluge, le vrai. A tel point qu'il s'est mis à pleuvoir dans la salle (un problème de toiture). Rien de bien grave en l'espèce mais merci chéri, la prochaine fois, évite de chanter quand-même (surtout quand on sait que tu ne chantes jamais, ô grand jamais... à part peut-être au Parc des Princes).

C'est une fois à table (et mes pieds au repos, bonheur intense) que j'ai commencé à me détendre pour de bon (et à me sentir à l'étroit dans ma robe déjà bien pesante). L'appétit a eu du mal à venir (le combo tranche de jambon, vieilles nouilles collées et Chavroux du midi, ça tient plus au corps qu'il n'y paraît n'empêche !) mais je me suis quand-même fichtrement régalée en dégustant Dos de Cabillaud, Noix de Veau rôtie et Soupe de Fraises Mara des Bois avec son petit sorbet au basilic (entre autres - miam !). Originellement, nous avions prévu de faire un repas classique, sans jeu ni rien entre les plats (étonnamment, la queue-leu-leu, les serviettes, les chaises musicales, ça ne nous tentait pas). C'était sans compter les surprises (et j'avoue, j'ai parfois eu très peur - "On est vraiment obligés de montrer à tout le monde cette photo où je me décrotte le nez ?") : vidéos et photos projetées retraçant nos petites vies et concert rock improvisé par les cousins. De grands moments de rigolade.

J'ai aussi eu la bonne idée de balancer mon bouquet de mariée pour épater la galerie (j'ai vu ça dans toutes les comédies romantiques faut dire). Si fort qu'il s'est éclaté contre un mur et que personne ne l'a ramassé, tout le monde le regardant seul, par terre, échoué comme une pauvre crotte sur le carrelage. C'est finalement sous la torture que j'ai obligé ma meilleure amie à le ramasser ("Non, non, je t'assure, il ne va pas te bouffer !", "Mais non, ça ne t'engage à rien..."). Et puis est venu le moment tant redouté où il a fallu ouvrir le bal (le truc qui pouvait m'empêcher de dormir quand je pensais à mon jour J). De quoi me donner envie de dégobiller les choux de la pièce montée fraîchement avalés. Moment inoubliable ou 2 manchots tournaient en rond sur fond de "Behind Blue Eyes" (on n'avait pas trouvé mieux), moi répétant en boucle : "Oh put*** j'en peux plus ! J'en peux plus !! Fais venir les autres !". Et puis finalement, une fois les invités sur la piste, nous avons tous dansé jusqu'au bout de la nuit (comme quoi !)... Bon, jusqu'à 4h20 du matin précisément.

Heure exacte à laquelle je me suis retrouvée toute con sur ma chaise à regarder mon père faire du air guitar sur "La Grange" de ZZ Top donc... Voilà, c'était fini. Certains invités étaient déjà rentrés chez eux depuis des heures, d'autres jouaient les prolongations. Ce n'est que quand le DJ a débranché son matériel que j'ai réalisé. J'ai réalisé que la journée que j'avais imaginée de toutes les façons possibles pendant 1 an s'était réalisée comme je le souhaitais (en mieux même). 2nd effet Kiss Cool, j'ai aussi réalisé... qu'il allait falloir ranger tout le bazar le lendemain. Et ça, vraiment, ça n'a pas été une partie de plaisir. Je n'ai pas fermé l’œil de ma 1ère nuit de femme mariée car je n'arrêtais pas de revoir dans mon cervelet fatigué le film de mon mariage (et puis quel mal aux jambes après 4 heures de danse non stop !). C'est donc la tête en vrac (avec un bon gros rhume en guise de cadeau de mariage) que j'ai jeté, décroché, plié, écrasé, rangé, vidé et ramené à la maison tout ce que nous avions mis des heures à créer et à installer. Sans nostalgie aucune finalement (et j'en étais la 1ère étonnée), j'étais tellement claquée...

Je n'avais qu'une hâte. Rentrer dans mon chez-moi, retrouver Dexter et reprendre le cours de ma petite vie simple et sans chichis. Après avoir passé une journée d'enfer à tout nettoyer, je me rappelle avoir mangé une bonne plâtrée de spaghettis vers 23 heures le dimanche soir, le salon envahi de cartons. J'ai tenu suffisamment longtemps pour regarder d'un œil (vitreux) la rediff' d'un vieil épisode de Dexter (non, pas le chat cette fois) sur TF1 vers 1 heure du mat' (je suis une nana très endurante question manque de sommeil). Le lendemain matin midi après-midi, enfin reposée après une bonne nuit dans mon lit, c'est toute légère que j'ai ouvert les volets de ma chambre. Et je n'ai pas pu m'empêcher de tourner la tête vers la droite pour regarder l'église, sise à 5 mètres de chez moi, endroit où j'ai vécu l'un des plus beaux moments de ma vie.